Apprendre à lire n’est pas simple. Comme adultes, nous avons souvent tendance à l’oublier. Lire est devenu un tel automatisme que nous ne pouvons même plus nous empêcher de le faire : regarder un mot écrit sans le lire relève de l’exploit. C’est plus fort que nous ; dès que l’on voit un mot écrit, notre cerveau cherche immédiatement à le lire. Cela se fait tout seul. Un peu comme faire du vélo ou nager. Nous n’avons plus besoin de penser à comment on fait. On le sait, c’est tout. Le fait qu’une habileté soit aussi bien automatisée est signe qu’elle est bien apprise et maîtrisée.

 

Le but de l’apprentissage de la lecture est donc justement d’aller chercher cette automatisation. C’est probablement pour cela que vous entendez aussi souvent les enseignants ou les orthopédagogues vous parler de « nombre de mots lus par minute » ou de « vitesse de lecture » chez les enfants. Ces mesures leur indiquent si la lecture semble assez automatisée, donc si elle se développe bien.

 

Ces chiffres sont donc là à titre indicatif afin de pouvoir identifier si un enfant présente des difficultés à automatiser la lecture. Si la vitesse de lecture de votre enfant est moins rapide que celle attendue, c’est alors un signe qu’il y a possiblement anguille sous roche : certaines habiletés de base pourraient être moins bien intégrées et pourraient nuire à l’automatisation de la lecture. C’est à ce moment qu’une évaluation plus approfondie et spécialisée de la lecture est indiquée. Cette évaluation permet d’identifier si l’enfant a réellement des difficultés et, si oui, d’en identifier la cause. Cibler rapidement l’origine des difficultés permet de travailler spécifiquement ces éléments et ainsi, améliorer efficacement la lecture.

 

J’aime bien faire la comparaison de ces éléments avec une tour de blocs. Si je ne regarde quBlog_jengae la hauteur de la tour (qui représente la vitesse de lecture) et que je constate qu’elle est moins haute que celles des autres enfants, je pourrais alors être tentée de mettre toutes mes énergies à mettre de nouveaux blocs dans le haut pour tenter de rattraper mes amis. Par contre, si je ne cherche pas à comprendre pourquoi elle est plus petite que celles des autres, je peux continuer à essayer de mettre plusieurs blocs dans le haut, mais il se peut fort bien que plusieurs d’entre eux retombent. Je ne réussirais alors pas, malgré tous mes efforts, à la faire grandir de façon durable. Cependant, si je prends plutôt le temps de regarder ma tour en entier, il se peut que je constate qu’il manque quelques blocs dans ma base ou qu’elle soit instable. C’est alors seulement en travaillant à solidifier ma base que je pourrai améliorer significativement la hauteur de ma tour.

 

C’est la même chose avec la lecture. Si on concentre uniquement sur le travail sur le plan de la vitesse en lecture (le haut de la tour) et qu’on ne travaille pas à identifier l’origine des difficultés si à travailler à ce niveau, nous essayons de mettre des blocs sur une tour qui n’a peut-être pas une base assez solide. Comprendre ce principe permet de comprendre pourquoi plusieurs programmes qui ne visent que l’amélioration de la vitesse de lecture sont peu efficaces pour travailler sur l’origine des difficultés d’un élève. C’est le cas, entre autres, de certains programmes de surlecture, où l’enfant doit lire un même texte à plusieurs reprises et de façon chronométrée pour le lire de plus en plus vite. De tels programmes n’agissent souvent que sur le haut de la pyramide, sans travailler aussi la base. Ils ne permettent donc pas d’améliorer les habiletés en lecture des élèves à long terme. Pour obtenir plus d’information sur les programmes de surlecture, je publierai un prochain billet à ce propos sous peu, en fonction des plus récentes études publiées sur le sujet.

 

En somme, si l’enseignant ou l’orthopédagogue de votre enfant vous a déjà dit que le « nombre de mots lus par minute » ou la vitesse de lecture de votre enfant était plus faible qu’attendu, il pourrait être pertinent de consulter une orthophoniste pour faire une évaluation approfondie de chacun des aspects qui peuvent influencer la lecture. Cela permettra d’identifier l’origine des difficultés, de mieux les comprendre et donc, de mieux intervenir.